24ème dimanche Avent (et 24 décembre), homélie de frère Marie
Le roi David dit au prophète Nathan : « Regarde ! J’habite dans une maison de cèdre,
et l’arche de Dieu habite sous un abri de toile ! ». Dieu répondit à David : « Est-ce toi qui me bâtiras une maison pour que j’y habite ? ». Dieu n’est pas venu s’enfermer dans un palais de cèdre, il est venu habiter notre humanité pour nous conduire en son palais de gloire. Jésus lui-même dira que le Fils de l’homme n’a pas de pierre où reposer la tête. De même il répondra au sujet du temple : « Détruisez ce temple et moi je le relèverai en trois jours – mais il parlait du temple de son corps ». Ce corps qui est aussi le nôtre. Oui, le Verbe s’est fait chair et il est venu pérégriner avec nous.
En entendant résonner la salutation de l’Ange à Marie : « Réjouis-toi, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi. », nous entendons les pas de celui qui s’approche, qui vient pour combler le monde de sa paix, de sa justice, de sa vie et de son amour.
Nous comprenons que si cette salutation est portée par un Ange, elle ne vient pas portée par le bruit des médias, ou le bruit des mille et une rumeurs de ce monde. Non, cette salutation résonne dans un espace de silence, d’écoute attentive, elle résonne dans un cœur éveillé, un cœur qui espère, un cœur qui désire. Cette salutation résonne dans un cœur rempli et nourri par les promesses de Dieu qui traversent l’histoire. Elle résonne dans un cœur qui croit que tout est encore possible à Dieu, cet espace est le cœur de Marie. Oui, il fallait un cœur vierge, un cœur ouvert à l’inattendu de Dieu, pour que l’impossible se réalise.
Cet impossible qui vient contredire l’impression que le mal est vainqueur en ce monde. Cet impossible qui nous pousse à croire que l’amour est encore possible.
Le père cistercien Aelred de Rievaulx écrivait : « Par la conception du Seigneur et sa naissance, le monde entier a commencé à émigrer et à passer du pouvoir du diable au Royaume du Christ. » (Aelred de Rievaulx, sermons pour l’année, S 38, 2)
Cette venue du Christ que nous célébrons nous invite à émigrer vers notre révélation d’enfants de Dieu, par les chemins de la foi, par la mise en œuvre de l’Evangile, par la mise en œuvre de l’amour fraternel. Le oui de Marie unit au oui de Jésus, nous ouvre le chemin vers la terre de l’offrande de nous-mêmes, pour que cet impossible de Dieu fasse irruption en nos vies et en notre monde.
Le Prince de la paix, le Fils du Très-Haut toque à nos portes, il est à notre écoute et il se penche sur notre humanité humiliée. Notre humanité humiliée par ses peurs, humiliée par ses violences, ses convoitises et ses haines. Il se penche sur notre humanité humiliée dans le visage de l’étranger, dans le visage du migrant, du pauvre et du désespéré. Il se penche sur notre humanité humiliée par l’impuissance et la mort. Cette humanité humiliée le Christ la prend dans ses bras, la prend en son corps, pour l’élever, la consoler et la réconcilier dans la gloire du Père.
Oui, accueillir cette Paix du Christ et en être les artisans, est la vocation de l’humanité dans le dessein créateur et aimant de Dieu. C’est le long et patient labeur de Dieu pour faire advenir l’humanité à sa plénitude de vie et c’est un long travail de l’homme sur lui-même.
« Comment cela va-t-il se faire, puisque je suis vierge ? » dit Marie, « L’Esprit Saint viendra sur toi – lui dit l’Ange – La puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre. ». Oui, Marie est vierge non seulement de corps, mais surtout de cœur. Marie n’est pas mue par l’emprise de nos peurs qui font obstacles à l’impossible de l’Esprit divin. Son cœur accueille ce que l’homme ne peut concevoir, elle croît profondément en la parole de Dieu qui avait promis et qui maintenant réalise. Le Oui de Marie ouvre la porte à l’avènement du Prince de la Paix en ce monde, elle reçoit en elle le germe qui deviendra pain de vie, ce pain de vie qui sera déposé au soir de Noël dans une mangeoire. Par son « Oui », Marie ouvre la route à l’humanité sous la guidance du Pasteur de nos âmes. Ecoutons la voix du Prince de la Paix et partageons son œuvre de Paix, afin d’être appelés fils et filles du Très-Haut, et comme lui ouvrons nos cœurs à l’impossible, ouvrons notre capacité d’aimer.