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Fête du Coeur Sacré de Jésus, homélie de frère Marie

« Oui, à cause du trop grand amour dont il nous a aimés, alors que nous étions morts à cause de nos péchés, il a voulu la vie pour nous, la mort pour lui. De là ses blessures sur la croix, de là le salut qui nous a été octroyé. Désir de notre salut et désir de sa propre mort pour notre salut, telles sont les deux blessures, l’une d’amour, et l’autre de douleur, ou plus exactement l’une et l’autre des blessures d’amour. » (Baudouin de Ford, traités , 8)
L’évolution culturelle nous a influencés par une imagerie qui cantonne la notion de cœur au domaine de l’émotion affective, de l’émotion, voire de l’attirance.
La dimension biblique de cœur est bien plus large. Le coeur représente ce qui est de l’ordre de l’intériorité. Il englobe l’intimité de la conscience, les desseins bons ou mauvais que l’on tourne dans sa tête. Le cœur représente aussi cette part spirituelle en nous qui peut s’ouvrir ou se fermer à la présence de Dieu, à la relation. La lumière de la foi passe par le cœur, cette lumière intérieure et spirituelle qui éclaire l’intelligence de la vie, son sens, sa valeur, le cœur ressent la joie de la présence de Dieu, ou la peine de son absence.
Les Ecritures nous parlent aussi d’un cœur sclérosé, un cœur endurci qui ne veut rien entendre de la Sagesse divine, un cœur enclos sur sa propre possession, son propre pouvoir, un cœur qui se ferme au bien de l’autre jusqu’à le soumettre ou l’ignorer.
Le cœur exprime si bien le contenu de la personne, de ses intentions, de sa volonté et de ses désirs, qu’il va transparaître jusque dans ses agissements, ses choix, ses orientations.
C’est pourquoi lorsque l’on parle du cœur du Christ, nous parlons du cœur de Dieu qui se manifeste et s’exprime en son Fils Jésus, comme nous le rappelle St Jean: « Personne n’a jamais vu Dieu, Dieu Fils unique qui est dans le sein du Père, nous l’a dévoilé » Jn 1, 18.
Lorsqu’il s’adresse à ses disciples Jésus enseigne : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur, mettez-vous à mon école » Mt 11, 29.
Il ne faut pas se méprendre, cette douceur et cette humilité sont aussi l’expression de la force de Dieu, de sa fidélité, de sa patience, de sa miséricorde, même lorsque l’homme ne veut plus rien entendre de ce Dieu. Surdité et aveuglement de l’humain qui s’exprimera jusque dans la condamnation du Juste et de l’Innocent par excellence, le Christ Jésus par lequel Dieu donne sa vie et pardonne.
Même lorsque les hommes se dévoient dans leur liberté et qu’ils détruisent le projet de Dieu, Dieu ne peut se résoudre à effacer son œuvre, à ramener l’humanité et la création au néant. Non, son cœur se retourne en lui, il se repent du châtiment qu’il aurait pu appliquer en toute justice, il ouvre des voies de pardon et de repentir pour l’homme car dit-il : « Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu’il se repente, qu’il se retourne vers moi et qu’il vive ». C’est pour cela que Jésus peut déclarer qu’il y plus de joie pour un seul pécheur qui se convertit que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion. Mais où trouver quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de conversion ?
Oui le Seigneur est sans cesse en quête de nous, si le Seigneur nous désire tant, c’est pour nous faire entrer dans la vie qu’il détient en plénitude.
Dieu se présente comme un berger qui cherche à rassembler ses brebis, pour en prendre soin, les rendre heureuses. Il recherche ses brebis comme il recherchait Adam qui cachait sa peur et sa honte dans les buissons, car il veut que l’homme puisse vivre en sa lumière et non dans l’ombre du néant.
De cette initiative il ne nous en revient aucun mérite, c’est Lui qui nous a aimé le premier. Dans la parabole que déploie Jésus, ce qui sauve la brebis perdue c’est que le berger se fait un avec elle, comme il se fait un avec chacun de nous, quel que soit le prix de sa fatigue ou de sa peine, quels que soient nos chemins tortueux par lesquels il nous cherche.
Le cœur ouvert de Jésus est le lieu de toute réconciliation, c’est le chemin de notre divine filiation.
« Frères, nous dit St Paul, l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ».
Si l’Esprit Saint nous a été donné, s’il a été répandu en nos cœurs, c’est aussi pour que nous marchions selon l’Esprit. L’Esprit nous ouvre l’intelligence du cœur pour nous faire agir selon la vérité de Dieu qui s’exprime en Christ.
Jésus est doux et humble de cœur, mais il est aussi vérité et sainteté. Comme nous le voyons dans les évangiles Jésus n’hésite pas à fustiger l’hypocrisie religieuse, ou à dénoncer l’égoïsme et l’injustice.
Laissons-nous attirer par ce cœur qui nous parle si bien de Dieu et qui nous parle aussi de cette belle humanité que nous pouvons et sommes appelés à devenir en Christ.
Nous ne savons pas aimer comme il faut, comme nous ne savons pas nous laisser aimer comme il faut, mais à l’école du Christ et sous la conduite de l’Esprit Saint nous pouvons l’apprendre et l’expérimenter quelques soient nos limites humaines.