Fête de St Bernard, homélie du Père Abbé Vladimir
Chers Frères et Sœurs,
« Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde »
Les textes de la liturgie de ce jour nous présentent saint Bernard à la fois comme un exemple, un guide et une lumière pour que nous devenions nous aussi lumières selon cette parole de l’Évangile : « Vous êtes la lumière du monde ». Nous avons pour cela à la fois sa vie et ses écrits. Mais tant de siècles nous séparent de lui qu’il nous est parfois difficile de les interpréter. Il est une tâche pour les savants qui est celle de comprendre et d’expliquer le plus justement possible ce qu’a fait et voulu dire Saint Bernard en le resituant dans son époque et ce travail nous est très utile. Mais pour les simples que nous sommes ou que nous aspirons à devenir, il est une autre mission. Et cette mission, c’est Bernard lui-même qui nous la donne en écrivant au début de son commentaire du Cantique des Cantiques que nous devons bruler du désir non pas tant de connaître que d’expérimenter.
Il faut pourtant bien comprendre ce qu’il veut dire là : Expérimenter ce n’est pas nous laisser balloter par les vagues du sentiment et du ressenti, c’est nous laisser inspirer par la vie et les écrits de saint Bernard d’une manière pratique pour que cela transforme notre vie. C’est devenir sel et lumière en nous laissant saler et éclairer par ce que saint Bernard a vécu en méditant et commentant les Écritures ainsi qu’en cherchant la présence et l’amour du Christ dans la communauté. Les textes et la vie de saint Bernard deviennent alors une invitation non à l’imitation mais à l’inspiration. Car nous ne devons pas imiter les saints d’une manière servile mais nous laisser inspirer par eux pour devenir saints à notre tour selon la volonté de Notre Père des Cieux. Car, tous, nous sommes appelés à la sainteté.
« Vous êtes la lumière du monde »
Pour devenir lumière, la première expérience que Bernard nous invite à faire est celle de la connaissance de nous même. C’est ce par quoi commence selon lui, cette aventure tout à fait unique qu’est notre vie dans ce monde, notre retour vers le Père dans le Christ. Cette connaissance est connaissance de notre faiblesse et de notre fragilité mais dans la lumière de l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ : « Pour moi, tant que je regarde en moi-même, écrit saint Bernard « mon œil demeure dans l’amertume ». Mais que je regarde en haut et que je lève les yeux vers le secours de la divine miséricorde, aussitôt la joyeuse vision de Dieu adoucira l’amère vision de moi-même. . . . Ce n’est pas une médiocre vision de Dieu que d’expérimenter combien il est bon et se laisse fléchir, car « il est vraiment bienveillant et miséricordieux, et il pardonne volontiers la méchanceté ». Sa nature est la bonté, et ce qui lui est propre, c’est de toujours faire miséricorde et d’épargner ».
« Vous êtes le sel de la terre »
Pour devenir sel, si nous voulons suivre l’invitation des écritures, l’expérience que nous sommes invités à vivre et qui est communautaire est de découvrir la lumière de la vérité dans notre frère. Cela n’est pas réservé aux moines car l’Église toute entière est une communauté fraternelle. Ce sel est celui de la miséricorde. Écoutons encore saint Bernard : « Les miséricordieux découvrent bientôt la vérité dans leur prochain, lorsqu’ils étendent leurs affections à son endroit et qu’ils se conforment tellement à lui par les sentiments de la charité, qu’ils ressentent ses misères ou ses avantages comme si c’étaient les leurs propres ». Par l’amour qui se fait miséricorde, l’expérience de la connaissance de soi devient expérience de la conformation aux frères et donc expérience de la communion qui nous fait sortir de nous-mêmes et nous délivre de la prison de notre égoïsme. C’est cela l’extase de la charité fraternelle qui conduit à la communion à Dieu dont parle notre saint.
Chers Frères et Sœurs,
Laissons nous de tout notre cœur à l’école de Notre Père Saint Bernard éclairer et saler par l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance pour partager le bien de la communion.