Fête de la Toussaint, homélie de frère Marie
Chers frères et soeurs
La communion de tous les saints nous resitue dans un vaste réseau. Alors que nous sommes inondés de ‘réseaux sociaux’, la communion des saints est sans aucun doute le plus vaste ‘réseau’ qui ne déconnecte pas. Les saints et les justes de tous les temps sont toujours à l’œuvre en Dieu et avec Dieu. A l’œuvre pour nous soutenir, nous inspirer, nous éveiller à la quête incessante de la justice, de l’amour et de la paix. L’amour du Christ a accompli son œuvre en eux, l’œuvre d’une vie, dans des contextes tout aussi troublants et troublés qui ne manquent jamais à notre monde ni à l’Eglise. Sur les pages du ‘livre de vie’ sont postés les noms d’une multitude innombrable de témoins ; les connus et les inconnus, mais tous reconnus. Le signe de reconnaissance que les saints nous envoient c’est que Dieu ne fait pas acception de personne. De toutes langues, peuples et nations nous dit le livre de l’Apocalypse. Chacune de leur vie a été l’œuvre de l’artisan divin, qui les a configurés au Christ, à travers leurs belles aspirations, leur désir de bonheur, à travers aussi leurs petits côtés, leurs doutes, voir leurs péchés et leurs nombreuses conversions de cœur et d’esprit. Cette multitude invisible et cependant bien présente nous lie au Ciel et à l’humanité. Ils forcent notre espérance. Ils nous font entendre ce chant nouveau que si le mal est un défi, il n’a pas le dernier mot. Ils nous font entendre que l’Amour de Dieu est là vainqueur ; comme il l’a été en Christ, il l’a été dans leur vie il le sera aussi dans la nôtre.
Ils nous font entendre que nous ne devons pas avoir peur de la sainteté. La sainteté peut nous sembler trop éloignée. Quand nous lisons la vie de nombreux saints, écrites dans le style dit agiographique, on a l’impression qu’ils sont déjà saints dès le ventre de leur mère. Certes, en chacun de nous demeure un germe d’innocence, mais il a besoin d’être rejoint et sauvé. Le Pape François, dans son exhortation à la sainteté réajuste bien cette vision. Il rappelle que tout dans le parcours de la vie d’un saint n’est pas saint. Que tout dans le parcours de la vie d’un saint n’est pas parole évangélique. Même l’Ecriture nous dit que le juste pèche sept fois le jour. C’est dans la globalité d’une vie que l’on définit un saint, à travers un chemin de purification et de transformation opérées par la parole de l’Evangile et l’œuvre de l’Esprit Saint.
C’est en cela que résonnent les béatitudes prononcées par Jésus : Bienheureux ceux qui…
Nous aspirons tous au bonheur, mais le bonheur ne réside pas dans une vie confortable.
Le bonheur tout comme la sainteté est un chemin, un chemin qui nous ouvre au goût profond de la vie, à la découverte de notre véritable humanité. Cette humanité d’enfants de Dieu à laquelle nous introduit la vie du Christ Jésus. Ce chemin est source de joie profonde car il est en communion avec l’amour de Dieu.
Les béatitudes prononcées par Jésus n’en restent pas moins une parole qui tranche, un feu allumé sur la terre, un sel qui vient donner de la saveur à une vie qui nous paraît souvent amère et insensée de par la violence qui l’entoure ou l’habite. Jésus nous enseigne combien l’engagement de notre vie spirituelle est là pour irriguer toute notre vie humaine y compris les nécessités matérielles, en ceci nous rejoignons la douceur et l’humilité du Christ qui a penché le Ciel sur la terre pour les réconcilier. Nous sommes fils et filles de la réconciliation, Dieu ne règne ni par la violence, ni par la force, mais par la puissance du don de soi, par la douceur de sa Parole vivifiante.
C’est par ce don même que les saints se sont efforcés à mettre en œuvre la paix, la juste relation à Dieu et aux autres, la miséricorde, ils se sont laissés travaillés par la douceur de Dieu dans le désir que notre terre en porte la trace. La fin de l’évangile selon St Matthieu en manifeste les œuvres : c’est à l’accueil de l’étranger, du migrant, au verre d’eau donné, au malade et au prisonnier visité, au pauvre revêtu ou au voisin invité…que nous goûterons à ce bonheur et à cette sainteté.
Les saints que nous célébrons sont arrivés, nous sommes en route, restons connectés.