logo fond

Index de l'article

 

2ème dimanche b, homélie de frère Marie

Chers frères et sœurs,

Nous avons chanté avec le psaume : En ma bouche il a mis un chant nouveau, une louange à notre Dieu. A chaque eucharistie, comme à chaque rencontre de la Parole, qu’elle soit communautaire ou plus personnelle, le Seigneur vient à notre rencontre pour renouveler nos cœurs. Un cœur de disciple ne peut vieillir, ce n’est pas une question d’âge, c’est une mise en disponibilité, un désir et un élan vers cette nouveauté permanente de la vie en Christ.
A travers les textes de ce jour nous pouvons découvrir ce qui exprime les attitudes du disciple.

Nous y trouvons le langage de l’écoute. L’écoute qui se joue à deux niveaux comme pour le jeune Samuel. Il entend d’abord une voix qui l’appelle par trois fois par son nom jusqu’à ce que le vieux prêtre Elie comprenne que c’est le Seigneur qui appelait, qui avait une parole à délivrer. Ainsi dit-il au jeune Samuel : S’il t’appelle tu diras, parle Seigneur, ton serviteur écoute.
Cette écoute est l’attitude fondamentale qui nous pose devant Dieu. La profession de foi d’Israël commence par : Ecoute !
L’écoute, plus qu’une capacité auditive, est une attitude intérieure, une disponibilité du cœur. Comme avec un cœur d’enfant, le cœur tout neuf du petit Samuel, écouter c’est se laisser surprendre et captiver par Dieu, goûter et être attentif à sa parole. L’écoute établit la relation.
« Mon cœur m’a redit ta parole, cherchez ma face » Ps 26
Les deux disciples de Jean Baptiste entendirent aussi ce que Jean disait de Jésus, ils écoutèrent cette parole qui résonna en leur cœur : Voici l’Agneau de Dieu.
Ils se sentirent attirés et voulurent en savoir plus, ils suivirent Jésus.
Ce qu’ils avaient entendu les mit en marche, et là encore c’est le début d’une relation : Que cherchez-vous, leur demanda Jésus – Où demeures-tu ? répondirent-ils. L’écoute exprime le désir de connaître, ‘d’être avec’.
Le psaume de ce jour nous dit encore : Tu m’as ouvert mes oreilles,…alors j’ai dit : Voici je viens…Ps 39

Nous trouvons aussi dans nos textes le langage de la vue. La vue exprime l’attention. Jean Baptiste regarde avec attention Jésus qui passe, qui va et vient, il contemple Jésus qui s’offre au regard pour être reconnu en vérité pour ce qu’il est, l’Agneau de Dieu.
Voir, ce n’est pas seulement regarder et se faire une opinion, en attendant que Jésus fasse ses preuves. Non, ici, voir c’est contempler, c’est en nous comme une part de cœur d’enfant, un cœur neuf qui se laisse atteindre par la lumière de l’autre avant même de bien le connaître.
« Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu », nous disent les béatitudes. Ainsi voir, c’est suivre la lumière qui donne sens à nos vies, c’est nous laisser modeler par la réalité des promesses de bonheur dans laquelle Dieu nous entraîne. Le regard prend tout son sens dans une rencontre, un vis-à-vis, aussi Jésus se retourna pour voir les deux disciples qui le suivaient, il sonde le désir de leur cœur et ils les invitent à venir et à voir, à entrer dans une intimité de relation.
Ici voir ne peut se faire que dans une connaissance à travers un partage de vie. Ce n’est pas une théorie, comme le répètera l’évangéliste Jean, connaître c’est apprendre à aimer.

Nous trouvons aussi à travers nos textes, un autre langage, celui de la stabilité. Le petit Samuel demeure dans le Temple, il y dort même. Jean Baptiste se tient là, comme une lampe fidèle à son poste, il guette. Les disciples demandent à Jésus : Où demeures-tu ? Jésus les invite à demeurer avec lui ce jour-là. Pour bien écouter, voir, contempler, il faut demeurer.
Il est fort utile de se donner du temps pour se poser, de se mettre au calme, de se couper des occupations qui nous dévorent, ‘faire retraite’ pour se rendre intérieurement plus disponible. Mais plus profondément que cela demeurer c’est entretenir une relation, l’approfondir et y être fidèle.
Nous pouvons facilement nous laisser disperser, troubler et finalement perdre de vue ou devenir un peu sourd à cette présence du Christ à nos vies, et ceci se répercute dans la façon dont nous vivons les uns avec les autres, l’utile prend facilement le pas sur le primat de l’amour et de la paix.
Aussi, demeurer, c’est poursuivre un chemin, un chemin avec celui qui nous entraîne dans son chant nouveau, qui nous fait découvrir avec un cœur neuf, avec un esprit nouveau, la véritable beauté de nos vies, de notre humanité, celle que nous devons partager ensemble, mettre en œuvre, exprimer. Et cette nouveauté passe par Celui qui se donne sans cesse à nous, cet Agneau de Dieu qui nous enseigne et nous ouvre les yeux par son Esprit.
Dernier point que nous enseigne ces textes, la nouveauté de Dieu manifestée en Christ, passe et se transmet par nos humaines médiations. Nous sommes témoins et passeurs. Le vieil Elie apprend à Samuel à bien écouter. Jean Baptiste désigne l’Agneau de Dieu à ses disciples, les disciples eux-mêmes deviennent passeurs.
Aujourd’hui dans une période marquée par un manque de transmission, tout comme au temps du petit Samuel, période troublée en Israël, nous pourrions nous défendre que la parole du Seigneur se fait rare et qu’il n’y a pas de vision qui perce. Mais si nous inclinons un tant soit peu l’oreille de notre cœur, si nous ouvrons un tant soit peu les yeux de notre cœur et entretenons de façon durable cette relation avec l’Agneau de Dieu, alors nous serons les transmetteurs et les témoins d’un ‘chant toujours nouveau’, d’une louange à notre Dieu qui atteindra bien d’autres cœurs.