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3ème dimanche de l’Avent – A, homélie de frère Marie

 

Is 35, 1-6.10 ; Ps 146, 7-10 ; Jc 5, 7-10 ; Mt 11, 2-11

 

La joie à laquelle nous sommes invités en ce 3ème dimanche de l’Avent, est la joie d’une rencontre, la joie d’une venue. « Ne craignez pas voici votre Dieu,…il vient lui-même et va vous sauver » . Le prophète annonce les signes de cette venue, et Jésus les réalise en réponse à la demande de Jean le Baptiste : « Devons-nous en attendre un autre ? » .
La venue de Dieu a pour effet la vue, « les aveugles voient », c’est-à-dire la transformation de notre regard sur le monde qui nous entoure, la transformation de notre regard sur la valeur de la vie et de l’humain. Dieu nous fait voir par son propre regard : « Dieu regarda et cela est bon », petit refrain de la Genèse. Qui dit transformation de notre regard, dit transformation de notre cœur, de notre intelligence et de nos intentions : « Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu » .
Cette venue de Dieu a encore pour effet la transformation de notre écoute, « les sourds entendent ». L’écoute d’une parole qui nous enseigne les chemins de la vie, une parole qui nous enseigne « ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, et ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme » . Une parole que Dieu a préparée pour ceux qui l’aiment. Ecoute d’une parole qui nous entraine sur les chemins de la vie en faisant corps avec nous. Comme le dit si bien st Irénée, une parole, qui pleine de l’Esprit de Dieu, nous ‘plasme’, nous modèle, nous crée, en nous rejoignant dans les moindre fibres de notre humanité, dans nos questionnements, nos désirs, nos rêves, nos joies et nos peines.
Sur la montagne de la transfiguration la voix du Père s’est faite entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé écoutez-le » . Dans cette écoute nous devenons des ‘bien-aimés’.
Cette connaissance qui transforme notre regard, notre écoute et notre cœur, rectifie notre marche, nos conduites de vie, elle nous entraine dans les œuvres de justice, de miséricorde et de bienveillance. « Soyez ainsi les fils de votre Père qui est aux cieux ».

Le paradoxe que soulignent nos textes, c’est que cette joie annoncée, cette joie de la rencontre, passe par le désert. Le désert apparaît comme un incontournable, voire une nécessité pour que le Seigneur se manifeste. C’est au désert et à la terre de la soif que le prophète annonce la joie et la fécondité.
« Qu’êtes-vous allés voir au désert, dit Jésus en parlant de Jean le Baptiste,…bien plus qu’un prophète, un messager envoyé en avant de moi pour préparer mes chemins, ma venue » .
Dans le projet monastique le désert fait partie intégrante de la forme de vie et du chemin spirituel. Tout comme pour le peuple de l’exode, ou pour Jean le Baptiste, ou comme Jésus au désert, le désert ouvre à une filiation confiante, libre et aimante. « Je la conduirai au désert et je parlerai à son cœur » nous dit le prophète Osée . Comme nous le dit le lérinnien St Eucher, au désert l’âme devient libre de dialoguer avec son Epoux, le Christ, nouvel Adam. Ce n’est pas réservé aux moines, c’est la marque de toute vie chrétienne authentique. C’est que le désert désigne en fait la séparation de tout ce qui aliène l’homme, ses assurances trompeuses qui lui donnent l’illusion d’exister ; la vanité du pouvoir, du culte de soi, la convoitise incessante de la possession, avec les frustrations que tout cela occasionne, car c’est le lieu de profondes injustices, de violences, d’exclusion et d’aveuglement, illusion d’exister qu’à travers ce que l’on peut maîtriser, posséder. La parole de Dieu, en quelque sorte nous dépossède pour nous faire entrer dans la connaissance de l’amour gratuit et du don, pour ouvrir nos yeux et nos oreilles sur l’existence de l’autre, de cet Autre qui nous habite et qui sans cesse vient à nous avec sa puissance de vie et d’amour, et des autres qui sont nos frères et sœurs en humanité, et dans lesquels nous pouvons nous reconnaître avec tout le mystère qui nous habite et qui est le lieu d’une évangélisation, de la mise en œuvre d’une ‘Bonne Nouvelle’.
Ainsi le plus petit dans le Royaume des cieux est plus grand que Jean le Baptiste, car le Christ transforme notre désert en jardin.
Mais comme nous le dit si bien St Jacques dans sa lettre, les pleins effets en nous de la venue du Seigneur réclament la patience et l’espérance du cultivateur ; aussi ne nous lassons pas de faire le bien. Ayons le cœur ferme, ouvrons nos yeux, nos oreilles, et laissons-nous envahir par une vraie joie, pure, car la venue du Seigneur est proche.
Is 35, 4
Mt 11, 3
Mt 5, 8
1 Co 2, 9
Mc 9, 7
Mt 11, 10
Os 2, 16