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Fête de Saint Benoît, homélie du P. Abbé Vladimir

Cher Frères et Sœurs,

« Voici que nous avons tout quitté pour te suivre ».

Alors que le jeune homme riche s’en est allé tout triste à l’invitation du Sauveur de venir à sa suite, en ce jour où nous fêtons saint Benoît, nous sommes invités à nous laisser guider par cet homme de Dieu pour cheminer comme Pierre à la suite du Christ. C’est bien cela le cœur de l’Évangile, le Royaume déjà présent, être uni, être un seul esprit avec le Seigneur.

Tout autant par l’exemple de sa vie que par l’enseignement de la règle qu’il a composé, Benoît se révèle malgré l’écart des siècles un guide incomparable dans notre marche avec le Christ sous la conduite de l’Évangile. Nos premiers pères cisterciens l’on souvent comparé à Moïse à cause de cela. Mais quelle est la terre promise vers laquelle il nous conduit sinon celle de la paix, paix retrouvée avec soi-même, paix avec le prochain même lointain et paix avec Dieu. « Si tu veux avoir la vie véritable, écrit le père des moines dans le prologue de sa règle, cherche la paix avec ardeur et persévérance ».

Mais pour trouver cette paix et recevoir la sagesse qui nait de l’écoute, il nous faut tout quitter non pour obtenir une récompense mais avec gratuité. C’est cela la conversion, le retournement que demande l’Évangile dont la parole nous invite à perdre notre vie pour la gagner : « Qui cherchera à conserver sa vie la perdra et qui la perdra la sauvegardera ». « Oui beaucoup de premiers seront derniers, beaucoup de derniers seront premiers ». Cet enseignement ne concerne pas que les moines. Saint Benoît est patron de l’Europe, car il a quelque chose à dire à tous sur le fait de quitter, sur le renoncement qui est la clef d’une humanisation plus complète.

Pour habiter là où se trouve la paix, non celle du monde mais celle du Christ, il nous faut tout quitter par l’humilité. C’est l’humilité qui nous permet de nous situer à notre juste place et d’avoir des relations justes. La Parole du Seigneur nous invite à passer librement, volontairement,  du propre au commun, pour garder l’unité dans l’Esprit par le lien de la paix. Il nous faut sortir de l’individualisme, du repli sur nous qui rend notre âme courbée, centrée sur elle même pour nous intégrer dans une communauté de personnes à l’image de cette communion parfaite qu’est la Trinité. C’est l’échelle que la Règle écrite par Benoît comme un résumé de la sagesse monastique nous propose de gravir : renoncer à la volonté propre repliée sur elle-même qui ne cherche que la satisfaction de ses désirs, embrasser la patience, mettre toujours les autres devant nous. Par ce chemin, on parvient à cet amour parfait qui bannit la crainte, la peur de soi-même, la peur des autres et la  peur de Dieu. La communion et le partage ne naissent pas de l’abondance sinon notre monde ne serait pas menacé d’être carbonisé dans sa richesse et la multiplicité des biens illusoires qu’il propose à certains tout en les refusant au plus grand nombre. La communauté nait du renoncement et du fait de se quitter. C’est cette vie commune que nous propose l’Évangile quelle que soit notre vocation.

À l’école de saint Benoît et de l’Évangile, recherchons non ce qui est utile pour nous même mais bien plutôt pour autrui. Apprenons à recevoir le monde comme un don dans la lumière de Dieu pour vivre en communion dans la paix.